Lot 12
Catalogue
Estimation : 20 000 € - 30 000 €
Georges de FEURE (Paris, 1868 – 1943)
Dans la dune
Aquarelle gouachée
Signée ‘DEFEURE’ en bas à droite
Plusieurs étiquettes au verso
(Déchirures et enfoncement sur le bord supérieur à droite)
In the dune, gouache watercolour, signed, by G. de Feure
10.63 x 17.13 in.
27.0 x 43.5 cm
Provenance : Collection Gérard Lévy ;
Puis par descendance
Expositions : Esthètes et Magiciens / Symbolistes des collections parisiennes, Paris, Musée Galliera, décembre 1970 – janvier 1971, cat. n° 49 : « Rêverie au clair de lune », reproduit [étiquette au verso]
Georges de Feure, 1868-1943, Amsterdam, Van Gogh Museum, 26 novembre 1993 – 13 février 1994, cat. n° 7 : « Dans la dune (In the Dunes) », reproduit p. 37 [étiquette au verso]
Georges de Feure, du symbolisme à l’art nouveau (1890-1905), Saint-Germain-en-Laye, Musée Départemental Maurice Denis – « Le Prieuré », 11 mars – 5 juin 1995 ; Gingins (Suisse), Fondation Neumann, 15 juin – 3 septembre 1995, cat. n° 7 : « Dans la Dune », reproduit p. 34 [étiquette au verso]
Bibliographie : Millman, Ian, Georges de Feure, Maître du Symbolisme et de l’Art Nouveau, Paris, ACR Edition, 1992, reproduit p. 45 : « Dans la Dune »
« Dans ses premiers tableaux, M. de Feure fut tellement sous l’influence de Baudelaire, qu’il se contenta le plus souvent de le paraphraser<a href="#_ftn1" rel="noopener noreferrer" target="_blank"><strong><i>[1]</i></strong></a> ». C’est en ces termes que le critique Henri Frantz, portant en février 1900 un regard rétrospectif sur les dix premières années de la carrière de Georges de Feure, souligne le caractère éminemment baudelairien de son œuvre. Pour Ian Millman, spécialiste de l’artiste, l’éloge de Frantz s’appuierait directement sur l’exemple de notre puissante aquarelle<a href="#_ftn2" rel="noopener noreferrer" target="_blank">[2]</a>. Les Fleurs du mal ont incontestablement ensemencé le développement du symbolisme tant littéraire que pictural à la fin du XIX siècle et, pendant toutes les années 1890, de Feure n’eut de cesse de puiser son inspiration dans les écrits de Baudelaire, en particulier dans Les Femmes damnées. Capital pour le poète, le thème de l'amour saphique l’est tout autant pour le peintre, qui s’inscrit ainsi dans l'expression la plus achevée et la plus extrême de l'esthétique décadente. Intitulée sobrement Dans la dune, notre œuvre prend comme point de départ les premières lignes du poème où Baudelaire décrit des lesbienne nues allongées près de la mer, leurs pieds et leurs mains se touchant, regardant l'horizon, semblables à du bétail qui rumine :
« Comme un bétail pensif sur le sable couchées,
Elles tournent leurs yeux vers l’horizon des mers,
Et leurs pieds se cherchant et leurs mains rapprochées
Ont de douces langueurs et des frissons amers<a href="#_ftn3" rel="noopener noreferrer" target="_blank"><strong><i>[3]</i></strong></a>. »
Cependant, loin d’en faire une traduction littérale, de Feure s’approprie les vers et l'imagerie du poète pour en développer la narration par une série de subtiles variantes. A rebours du synthétisme résolument moderne qui lui est propre, l’artiste ajoute ici un délicat rayon de lune qui focalise toute l'attention sur le couple solitaire, alternant les carnations brune et blanche. La dune semble surmonter au premier plan une curieuse caverne ou grotte. Ce motif, récurrent dans la production du peintre, ajoute un certain symbolisme à la composition en suggérant par l’évocation d’un monde souterrain un accès direct au subconscient comme à ses fantasmes sexuels les plus inavoués.
<a href="#_ftnref1" rel="noopener noreferrer" target="_blank">[1]</a> Frantz, Henri, « Georges de Feure », Le Figaro illustré, n° 119, février 1900, p. 38-47.
<a href="#_ftnref2" rel="noopener noreferrer" target="_blank">[2]</a> « Il se peut que ce fut en pensant à des œuvres comme Dans la dune », Millman, Ian, in Georges de Feure, du symbolisme à l’art nouveau (1890-1905), p. 3
<a href="#_ftnref3" rel="noopener noreferrer" target="_blank">[3]</a> Charles Baudelaire, « Femmes damnées », in Les Fleurs du mal, Poulet-Malassis et de Broise, 1857, p. 196.
Georges de FEURE (Paris, 1868 – 1943)
27.0 x 43.5 cm
« Dans ses premiers tableaux, M. de Feure fut tellement sous l’influence de Baudelaire, qu’il se contenta le plus souvent de le paraphraser<a href="#_ftn1" rel="noopener noreferrer" target="_blank"><strong><em>[1]</em></strong></a> ». C’est en ces termes que le critique Henri Frantz, portant en février 1900 un regard rétrospectif sur les dix premières années de la carrière de Georges de Feure, souligne le caractère éminemment baudelairien de son œuvre. Pour Ian Millman, spécialiste de l’artiste, l’éloge de Frantz s’appuierait directement sur l’exemple de notre puissante aquarelle<a href="#_ftn2" rel="noopener noreferrer" target="_blank">[2]</a>. Les Fleurs du mal ont incontestablement ensemencé le développement du symbolisme tant littéraire que pictural à la fin du XIX siècle et, pendant toutes les années 1890, de Feure n’eut de cesse de puiser son inspiration dans les écrits de Baudelaire, en particulier dans Les Femmes damnées. Capital pour le poète, le thème de l'amour saphique l’est tout autant pour le peintre, qui s’inscrit ainsi dans l'expression la plus achevée et la plus extrême de l'esthétique décadente. Intitulée sobrement Dans la dune, notre œuvre prend comme point de départ les premières lignes du poème où Baudelaire décrit des lesbienne nues allongées près de la mer, leurs pieds et leurs mains se touchant, regardant l'horizon, semblables à du bétail qui rumine :
« Comme un bétail pensif sur le sable couchées,
Elles tournent leurs yeux vers l’horizon des mers,
Et leurs pieds se cherchant et leurs mains rapprochées
Ont de douces langueurs et des frissons amers<a href="#_ftn3" rel="noopener noreferrer" target="_blank"><strong><em>[3]</em></strong></a>. »
Cependant, loin d’en faire une traduction littérale, de Feure s’approprie les vers et l'imagerie du poète pour en développer la narration par une série de subtiles variantes. A rebours du synthétisme résolument moderne qui lui est propre, l’artiste ajoute ici un délicat rayon de lune qui focalise toute l'attention sur le couple solitaire, alternant les carnations brune et blanche. La dune semble surmonter au premier plan une curieuse caverne ou grotte. Ce motif, récurrent dans la production du peintre, ajoute un certain symbolisme à la composition en suggérant par l’évocation d’un monde souterrain un accès direct au subconscient comme à ses fantasmes sexuels les plus inavoués.
<a href="#_ftnref1" rel="noopener noreferrer" target="_blank">[1]</a> Frantz, Henri, « Georges de Feure », Le Figaro illustré, n° 119, février 1900, p. 38-47.
<a href="#_ftnref2" rel="noopener noreferrer" target="_blank">[2]</a> « Il se peut que ce fut en pensant à des œuvres comme Dans la dune », Millman, Ian, in Georges de Feure, du symbolisme à l’art nouveau (1890-1905), p. 3
<a href="#_ftnref3" rel="noopener noreferrer" target="_blank">[3]</a> Charles Baudelaire, « Femmes damnées », in Les Fleurs du mal, Poulet-Malassis et de Broise, 1857, p. 196.
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